L'audit indépendant du contrat d'affermage révèle comment Sen'eau est «pillée» par sa maison-mère à savoir Suez. Ce, par la signature de 9 conventions dont certaines violent tous les règles comptables. La situation est telle que la dissolution de Sen'eau devait être prononcée avec les résultats de l'exercice 2021. Deuxième volet de nos révélations.
Après avoir remporté le contrat d'affermage au Sénégal, Sen’eau a laissé de côté l’expertise locale pour signer des conventions avec Suez sanctionnées par des transferts massifs de fonds qui ont fini par plomber sa trésorerie. Par exemple, Sen'eau a signé, pour une durée de 15 ans, une convention avec Suez groupe Sas dénommé «accès droits de propriété, prestations de services d'assistance technique, prestations de support opérationnel, prestations de formation». Entré en vigueur le 1er janvier 2020, ce contrat est facturé à 26 milliards de francs Cfa sur la période de 15 ans.
«Sur l'exercice 2021, cette convention a généré des charges pour un montant de 3 394 millions (ndlr, 3,394 milliards)», selon l'audit. Il a aussi signalé, dans ce lot, des conventions non encore signées ayant des effets sur l’exercice 2021, mais non préalablement approuvées. C'est le cas du contrat ayant pour objet le «remplacement du système d'information clientèle Saphir», signé le 16 décembre 2020 avec un effet rétroactif au 1er mars ars 2020 pour une durée de 72 mois.
«Au 31.12.2021 des immobilisations d'un montant de 1103 millions ont été comptabilisées», d'après l'audit qui cite encore le contrat ayant pour objet «fournitures et gestion de services partagés du groupe», d'une durée de 3 ans et entré en vigueur le 1er janvier 2020. Pour ce contrat, un montant de 173 millions a été comptabilisé concernant l'exercice 2021.
Une autre convention, d'une durée de 2 ans, a été signée le 3 février 2021 pour la maintenance de Saphir. Pour ce contrat, Suez a facturé à Sen'eau 270 millions de F Cfa en 2020 et 234 millions de F Cfa en 2021. On peut aussi citer, dans la foulée, la convention de fournitures et de prestations de services en informatique industrielle et technique avec Suez Smart Solutions.
Signée le 3 mars 2021, le contrat a pourtant pris effet... le 1er janvier 2021 pour une durée de 3 ans.
«Au 31.12. 2021 un montant de 136 millions de charges comptabilisées» a été enregistré, révèle l'audit qui a aussi évoqué l'avenant 1 à la convention portant «fournitures et prestations de services en informatique industrielle et technique» signé le 03.03.2021 avec Suez Smart solutions pour le déploiement des projets de 2020 et 2021 de télégestion du Centre Visio.
«Au 31.12.2021 un montant de 91 millions a été comptabilisé en charges», peut-on lire dans l'audit.
«Sur l'exercice 2021, les montants comptabilisés se présentent ainsi (en millions) : charges : 4 137; immobilisations : 1 181, soit un total de 5 318 millions. In fine, la perte de l'exercice 2021 d'un montant de 4 661 millions (ndir, 4,661 milliards ) est grevée de charges d'assistance du groupe Suez à hauteur d'environ 3 950 millions (ndrl, 3,950 milliards). Les conventions sur lesquelles sont adossées certaines de ces charges, d'un montant de 565 millions, n'ont pas encore été signées et approuvées», indique l'audit qui demande d' «appliquer rigoureusement les règles comptables, notamment l'enregistrement des transactions sur la base de contrats conclus régulièrement».
Effectivement, les chiffres de 2021 sont au rouge. D'après l'audit, le bilan du fermier atteste à fin 2021, les agrégats comptables suivants : pertes cumulées de 9 842 millions ; perte de 2021: 4 663 millions ; report à nouveau perte de 2020 : 5 179 millions ; capital social : 6 000 millions; fonds propres négatifs : 3 837 millions.
«Face à cette situation et aux termes des dispositions de l'Ohada (Art. 664 et suivants), Si du fait des pertes constatées dans les états financiers de Synthèse, les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social, le conseil d'administration du l'administrateur général, selon le cas, est tenu, dans les quatre (04) mois qui suivent l'approbation des comptes ayant fait apparaitre cette perte, de convoquer l'Assemblée générale extraordinaire (Age) à l'effet de décider si la dissolution anticipée de la société a lieu».
«Si la dissolution n'est pas prononcée, la société est tenue, au plus tard à la fin de la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, de réduire son capital, d'un montant au moins égal à celui des pertes qui n'ont pu être imputées sur les réserves si, dans ce délai, les capitaux propres n’ont pas été reconsidérés à concurrence d'une valeur au moins égale à la moitié du capital social», rappelle l'audit.
«Face à cette situation financière du Fermier, les dispositions de l'Ohada (Art. 664 et suivants) doivent être mises en œuvre par les organes délibérants en vue de statuer sur le devenir à court-moyen terme de la Sen'eau, fermier es qualité. Au cet effet, les actionnaires sont interpellés sur la situation financière actuelle du Fermier en exercice et doivent convoquer sans délai une assemblée générale extraordinaire (Age) pour statuer sur la situation actuelle de la société d'exploitation ce, en vertu ces prescriptions légales d'ordre public prévues par l'Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du Gie dans ses dispositions rappelées ci-avant», recommande l'audit.