L’Allemagne construit deux centres de déportation de migrants mineurs au Maroc
Depuis son ouverture aux réfugiés en 2015, aucun mineur non accompagné n’a été expulsé d’Allemagne. Berlin a cependant commencé à construire deux centres à cet effet dans le nord du Maroc pour accueillir les mineurs déportés. Ils auront une capacité d’accueil de 100 places chacun et seront gérés conjointement avec les autorités locales et des ONG spécialisées.
Le gouvernement allemand a commencé à construire deux centres de jeunesse dans le nord du Maroc pour loger des « enfants des rues » originaires du royaume ainsi que des « mineurs marocains non accompagnés qui ont été expulsés par l’Allemagne », selon un article du journal Welt am Sonntag.
Le projet pilote crée une voie légale permettant à l’Allemagne de commencer à expulser les jeunes sans devoir nécessairement localiser leurs familles en priorité. Ces dernières années, l’Allemagne n’a expulsé aucun mineur non accompagné.
Deux refuges construits en coopération avec Rabat
Selon le ministère allemand de l’Intérieur, cité par Welt am Sonntag, le projet implique deux refuges au Maroc qui abriteront chacun 100 jeunes. Les mineurs recevront une assistance sociale, des conseils et un accès à des opportunités éducatives. Ces centres seront construits en coopération avec le gouvernement marocain, les autorités locales et des ONG spécialisées.
L’Allemagne mène actuellement des pourparlers bilatéraux avec le gouvernement marocain à cet égard. « Notre objectif est de commencer à opérer dès que possible sur le plan opérationnel avec le projet pilote sur trois ans au Maroc ».
Selon un communiqué du ministère de l’Intérieur, les refuges « seront ouverts aux personnes de moins de 18 ans qui reviennent volontairement, ainsi qu’aux personnes expulsées de force, en particulier les jeunes condamnés pour des crimes ».
A cet effet, « un projet pilote a été initié qui vise à créer des capacités d’accueil et de soutien au Maroc ».Dans ces foyers, « des enfants de la rue natifs, non émigrés et des mineurs revenant d’Allemagne », seront pris en charge. « Des soins seront prodigués aux jeunes volontaires de moins de 18 ans et aux personnes renvoyées de force, en particulier les délinquants juvéniles ».
Ansgar Heveling, membre du parti chrétien-démocrate CDU)et ancien chef de la commission intérieure du Bundestag, a déclaré au journal que bien que le projet soit une étape importante, « il serait plus logique d’organiser des regroupements familiaux avec leurs familles dans leur pays d’origine ».
« Le fait que pas un seul migrant non accompagné ait pu être renvoyé chez lui ces dernières années montre que les autorités doivent redoubler d’efforts pour localiser les familles », a ajouté Heveling.
Welt s’est entretenu avec des conseillers de centres de jeunesse migrants en Allemagne qui ont déclaré qu’ils n’avaient vu aucune tentative des autorités de localiser les familles des jeunes, bien que beaucoup d’entre eux parlent régulièrement au téléphone avec leurs mères.
La décision de ce projet pilote date de mars
Les mineurs non accompagnés dont la demande d’asile a été refusée ne peuvent être expulsés par l’Allemagne que dans des conditions strictes. Avant l’expulsion, les autorités allemandes doivent assurer l’une des deux options suivantes : un membre de la famille ou un tuteur responsable devra accueillir l’enfant au Maroc, ou qu’une structure d’accueil adaptée est disponible dans leur pays d’origine. Cependant, des centaines de mineurs ont été refoulés à la frontière ou leurs demandes d’asile ont été rejetées ces dernières années.
Le gouvernement allemand a annoncé son intention de construire les centres en mars dernier. Les chiffres de l’époque montrent que 48 000 réfugiés mineurs non accompagnés vivent en Allemagne.
Depuis l’accueil de milliers de migrants et de réfugiés en 2015, la chancelière allemande Angela Merkel et son gouvernement ont été mis sous pression pour endiguer le flux migratoire. Près de 900 000 réfugiés et migrants sont entrés en Allemagne en 2015. Cette année, le nombre d’arrivées devrait être inférieur à 200 000.
En septembre 2016, Merkel et le roi Mohammed VI avaient eu un nouvel entretien ce mercredi concernant la situation des migrants clandestins marocains qui demandent l’asile en Allemagne, à l’issue duquel le souverain avait ordonné au ministre de l’Intérieur de l’époque, Mohamed Hassad, de se rendre sur place pour « accélérer l’identification et le rapatriement des ressortissants marocains concernés par cette opération », rapportait un communiqué du cabinet royal . Cette question avait déjà fait l’objet d’une discussion en janvier 2016 entre Mohammed VI et Angela Merkel, qui a décidé de durcir les règles pour les migrants marocains
Lorsqu’il lui a été demandé si des institutions similaires, comme celles prévues au Maroc, étaient envisagées dans d’autres pays, un porte-parole du gouvernement allemand a déclaré qu’il n’y a actuellement « aucun plan similaire à l’étude ».
Myriam TIXIER
Commission Solidarités Internationales
Coordinatrice Administrative et Financière - Collectif Loujna-Tounkaranke