Les maires interpellés sur leurs actions pour le droit à l'eau

La campagne “L’eau est un droit” s’est installée au Salon des maires, du 19 au 21 novembre 2019. Pendant 3 jours, les candidats aux élections municipales de 2020 ont pu signer le Manifest’eau et prendre des engagements pour que l’accès à l’eau et à l’assainissement devienne une réalité sur leur territoire. Plus que jamais, les élus ont un rôle déterminant à jouer dans les orientations qui seront prises ces prochaines années.

la Coalition Eau, revient sur les objectifs du Manifest’eau :

  • Garantir un tarif de l’eau et de l’assainissement accessible,
  • Garantir l’accès à des infrastructures d’eau et toilettes publiques,
  • Instaurer un dialogue avec tous les acteurs pour des solutions adaptées et pérennes,
  • Renforcer les financements pour la solidarité décentralisée, via notamment le dispositif de la loi Oudin-Santini,
  • Renforcer la participation citoyenne et la démarche partenariale des coopérations à l’international.

La campagne continue :

  • Les 29 et 30 janvier 2020, les associations seront présentes au Carrefour de l’Eau, à Rennes
  • Le 22 mars 2020 pour la Journée Mondiale de l’Eau
  • En juillet 2020, nous célébrerons les 10 ans de la reconnaissance des droits humains à l’eau et à l’assainissement par les Nations Unies.

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2-En finir avec les malheurs de l’écologie

Par Edgar Morin, sociologue et philosophe — tribune dans Libération 2 février 2020

Afin de sortir de la croissance comme solution politique et économique, le sociologue suggère un new deal écologique qui intégrerait démocratie, justice, liberté et qualité de vie.

L’écologie (du grec oikos, «demeure», et logos, «science») est une science qui, proposée par Ernst Haeckel (1) en 1866 pour la connaissance des relations entre les organismes vivants et leurs milieux de vie, n’a pu se développer tardivement qu’à partir de la notion d’écosystème, forgée en 1935 par Arthur George Tansley (2) et désignant l’ensemble concret constitué par un milieu géophysique («biotope») et l’ensemble des espèces qui y vivent («biocénose»).

Les écosystèmes sont des organisations nées et entretenues par les interactions entre un milieu géophysique et les espèces y vivant, unicellulaires, végétaux, animaux. La connaissance des écosystèmes par l’écologue (terme différenciant le scientifique de l’écologiste) nécessite des connaissances puisées dans de multiples et diverses disciplines, les unes physiques et géographiques, les autres biologiques.

Comme presque partout ces disciplines sont séparées dans la recherche, dans l’université, dans l’enseignement, la science écologique inévitablement polydisciplinaire n’a pu se former que dans quelques esprits ouverts, biologistes ou géographes (lesquels ont des compétences allant du géologique à l’humain), et dans quelques rares institutions non conformistes comme le Massachusetts Institute of Technology (MIT) ou l’université de Berkeley, aux Etats-Unis.

L’accroissement des pollutions urbaines et industrielles ainsi que des dégradations naturelles dans les années d’expansion techno-économique des années 50-60 stimula la recherche écologique et suscita d’inquiétantes prévisions, comme la mort de l’océan par Paul Ehrlich, qui sembla grotesque à l’époque, et en 1972, surtout, le «rapport Meadows» (professeur au MIT) ; celui-ci considère pour la première fois l’ensemble et l’amplification des dégradations dues au développement techno-économique qui affectent la biosphère terrestre et arrive à la conclusion qui constitue le titre du rapport : «Les limites à la croissance (dans un monde fini)».

Le rapport détermine une onde de choc qui va constituer, hors de la science, une première conscience écologique : certains vont promouvoir l’idée de croissance zéro, et d’autres plus tard celle de décroissance (nous y viendrons), d’autres pensent que cette conscience doit déterminer un changement profond, non seulement des énergies polluantes charbon et pétrole pour développer des énergies propres, mais dans les modes de production de consommation et les modes de vie dans notre civilisation. René Dumont, Serge Moscovici, André Gorz, moi-même développons alors réflexions et propositions.

Des mouvements d’écologie politiques apparaissent en différents pays, surtout occidentaux, le thème de la protection de la nature et celui de la réforme de nos modes de consommation sont présents en eux mais ils se fixent surtout des objectifs immédiats ; s’ils exploitent les données catastrophiques que fournit la science écologique, ils négligent la connaissance de cette science même, et du reste ils sont contraints de la négliger car en France notamment les structures universitaires et pédagogiques rendent impossible l’entrée de l’écologie polydisciplinaire et complexe par nature dans l’enseignement. Car l’enseignement de la science écologique serait en même temps celui d’une pensée complexe qui contextualise toujours et toujours saisisse interactions et rétroactions.

De même la science écologique incite à dépasser la pensée binaire qui ne voit dans la nature soit que le conflit et la prédation, soit que la communication et la coopération. Or, dans l’univers physique comme dans la nature vivante et dans l’univers social, «discorde et concorde sont père et mère de toutes choses» comme le savait Héraclite six siècles avant notre ère. La nature n’est ni mère ni marâtre, elle est à la fois mère et marâtre, nourricière et tueuse. Elle donne vie et mort. Elle nous enchante de ses splendeurs et nous terrifie de ses cruautés.

Or c’est cette forme de pensée et de connaissance qui n’est pas entrée dans les esprits des écolos de l’écologie politique. Ils se nourrissent au mythe unilatéral de la bonne nature, ils répugnent à contextualiser, ils ne sont pas sensibles aux complexités. Et il est remarquable que jamais les écolos politiques aient demandé l’enseignement de la science écologique dans les écoles et universités.
Il est non moins remarquable que le mot «écologie», qui témoigne d’un englobement (oikos) et d’une organisation (logos), soit abandonné pour le terme vague et extériorisé d’«environnement», ce qui est une dégradation conceptuelle.

La structure cognitive qui, au sein de notre civilisation, disjoint l’humain (individu et société) du naturel biologique et physique, est un grand obstacle pour une prise de conscience.

En effet tout converge dans notre culture pour faire de l’homme un être différent de tous les vivants. Le Dieu biblique a créé l’homme à son image, Paul a promis la résurrection et l’Eglise a créé le Paradis, où sont interdits les toutous et les minous. Descartes énonce le credo de l’Occident techno-industriel où l’homme est voué à conquérir et dominer le monde naturel ; croyance dont l’hégémonie ne s’atténuera que récemment sans toutefois que s’affirme la conception que l’homme est à la fois animal et spirituel, que nature et culture y sont inséparablement liées, et que nous dépendons irrévocablement de la Nature qui dépend de nous.

C’est pourquoi les catastrophes de Tchernobyl, Three Mile Island, Fukushima ne provoquent que des émotions provisoires dans la grande léthargie ; les dégradations innombrables dans les airs, les eaux, les terres, y compris les terres vouées à l’agriculture industrielle, ne font progresser que trop lentement la conscience écologique comme conscience des périls qui menacent à la fois le local et le global du monde vivant et humain.

De plus les forces de résistance sont énormes : pas seulement les habitudes de pensée, mais aussi les énormes intérêts économiques qui amènent même des dirigeants d’Etat à nier les périls. Les écologistes politiques sont eux-mêmes incapables de déterminer une voie pour le problème de la croissance ; ils ne peuvent qu’opposer décroissance à croissance alors qu’il faudrait les complémentariser : déterminer ce qui doit croître, l’économie des besoins vitaux, l’économie des produits salubres, l’agroécologie et l’agriculture fermière, l’économie des produits de consommation et d’usages locaux, l’économie sociale et solidaire, l’économie circulaire, l’économie artisanale et néoartisanale, les subsides aux services publics, notamment hôpitaux et écoles ; ce qui doit décroître : l’économie de l’agriculture industrialisée et de la conservation industrialisée, l’économie des produits à la qualité illusoire pour beauté, santé jeunesse, l’économie des produits à obsolescence programmée, l’économie du jetable, etc

Ce new deal dépasserait par son ampleur la dite «transition écologique» qui réduit le problème à celui du passage d’une société non écologisée à la même société écologisée : en fait, il s’agit de la métamorphose complexe d’un type de société à une autre.

Et surtout ce qui fait besoin est la conception d’un new deal où s’intégreraient mutuellement l’une en l’autre une écopolitique et une politique où les problèmes de démocratie, d’égalité, de justice, de liberté, de solidarité sont non écologiques, tandis que les problèmes clés de la qualité de la vie nécessitent l’intégration profonde de l’écologique dans le social et le politique. C’est bien cette pensée que j’ai tenté de développer dans mon livre la Voie (3) ; c’est bien cette politique qu’a esquissée le rapport Hulot-Berger. On ne peut être seulement écolo.

Il nous faut une pensée politique intégrative, laquelle a besoin du fondement où l’humain et le naturel ne sont pas seulement liés parce que se nourrissant l’un l’autre, mais où ils ont un tronc commun et sont présents l’un dans l’autre : l’humain n’est pas seulement dans la nature, la nature est à l’intérieur de l’humain, comme l’individu n’est pas seulement dans la société, mais la société est à l’intérieur de l’individu.

Un demi-siècle s’est écoulé depuis le rapport Meadows. Mais à part chez des géographes et des biologistes, la science écologique demeure inconnue y compris des écologistes. Un demi-siècle s’est écoulé depuis que la croissance a été mise en question. Elle continue, impavide, à se présenter comme solution pour l’élite politico-techno-économique, et les écolos n’ont pu formuler la nécessité de lier les termes antagonistes de croissance-décroissance.

Un demi-siècle s’est écoulé depuis que le tocsin a sonné. La pollution ravage les mégapoles, la stérilisation ravage les terres arables. La cupidité économique incendie les forêts d’Amazonie, tandis que celles d’Australie brûlent faute des précautions que connaît la culture millénaire des aborigènes.
Un demi-siècle s’est écoulé depuis une juste prédiction qui se vérifie quotidiennement. Les Etats commencent à peine à signer de timides accords de sauvegarde qui sont reniés par les plus puissants.
C’est alors qu’une jeune Scandinave de l’âge de Jeanne d’Arc brandit au monde un drapeau vert et commence à être suivie par des cohortes d’adolescents. Elle est moquée et discréditée par les Cauchon d’aujourd’hui, évêques de la sainte économie libérale.

Federico García Lorca, dans un des poèmes de l’admirable Romancero gitano, disait : «Pero quién vendrá ? Y por dónde ?»

(1) Ernst Heinrich Philipp August Haeckel (1834-1919) est considéré comme le père de l’écologie.
(2) Arthur George Tansley (1871-1955) était un botaniste britannique, pionnier dans l’écologie des plantes.
(3) Edgar Morin, la Voie pour l’avenir de  l’humanité, éd Fayard (2011).

 

 

 

 

3-L’Alliance africaine de l’eau dresse le bilan de ses activités  
L’Alliance africaine de l’eau a organisé un atelier de revue annuelle 2019 et de planification 2020, le 24 janvier à Assinie, dans la région du Sud-Comoé. Objectif : faire l’inventaire de l’exercice passé et d’enclencher le processus de programmation des actions à mener au cours de cette année. Cet atelier se tient à l’orée de la célébration de son 20e congrès qui coïncidera avec ses 40 ans d’existence. Il se tiendra à Kampala en Ouganda du 24 au 28 février 2020. Lire la suite

L’Alliance africaine de l’eau dresse le bilan de ses activités à l’orée de ses 40 ans d’existence.

Frederic Goré-Bi/RTIinfo |

L’Alliance africaine de l’eau a organisé un atelier de revue annuelle 2019 et de planification 2020, le 24 janvier à Assinie, dans la région du Sud-Comoé. Objectif: faire l’inventaire de l’exercice passé et d’enclencher le processus de programmation des actions à mener au cours de cette année. Cet atelier se tient à l’orée de la célébration de son 20e congrès qui coïncidera avec ses 40 ans d’existence. Il se tiendra à Kampala en Ouganda du 24 au 28 février 2020.

En effet, il a été question d’une part de faire le point des activités réalisées en 2019 comparativement aux prévisions, des échanges sur les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de ces actions et d’autre part de l’identification et de la planification des projets et des programmes de 2020.

"Je vous encourage à vous investir entièrement dans les travaux, afin qu’au sortir d’ici, l’AAE soit dotée d’un plan d’action 2020, certes ambitieux, mais réaliste qui nous permette de poursuivre notre contribution à l’atteinte de la cible 6 des Objectifs de développement Durable (ODD) qui est de "garantir l’accès pour tous à l’eau salubre et à l’assainissement d’ici 2030", a indiqué Sylvain Usher, directeur exécutif de l’Alliance Africaine de l’eau.

Tout en évoquant l’accès à l’eau et aux services d’assainissement sur le continent africains, le directeur exécutif de l’AAE a par la même occasion traduit les défis auxquels est confronté son organisme et qu’il est impérieux de relever.

"40 % de la population Africaine, n’a pas accès à l’eau potable, alors que l’Afrique est gorgée d’eau, et 72% ne bénéficie pas d’un système d’assainissement adéquat", a-t-il révélé.

A travers des travaux de groupes et des sessions plénières, les différentes directions de l’Alliance africaine de l’eau ont fait le point de leurs activités. Histoire de savoir à quel niveau se trouve l’association. Ces activités ont pris en compte les orientations stratégiques de l'AAE telles qu'engoncées dans le Plan Stratégique 2018-2022.

L’Alliance africaine de l’eau (AAE) est née en février 1980 sous l’appellation de l’Union Africaine des Distributeurs d’Eau, de la volonté de quelques dirigeants des sociétés d’eau d’Afrique, de mettre en commun leurs ressources humaines, techniques et financières, afin d’optimiser sur la formation des hommes et des femmes des entreprises du secteur, et de créer une synergie autour de la recherche de solutions.

Ceci pour l’amélioration de l’accès des populations africaines aux services d’assainissement et à l’eau potable. Elle regroupe les sociétés de production et de distribution d’eau potable, celles qui gèrent les services d’assainissement, ainsi que celles qui régulent les politiques sectorielles dans les pays Africains.

 4- Sénégal : Vers le renforcement de la gouvernance des eaux internationales
Des discussions sont en cours à Rome, la capitale italienne, sur les possibilités d'élargir les activités d'un programme mondial de renforcement de la gouvernance dans les eaux internationales et de consolidation des mesures de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), a annoncé la FAO. Ces discussions ont notamment lieu en marge d'une réunion du comité directeur mondial du programme dénommé ZHJN (Zone marine hors juridiction nationale). Lire la suite

 


 5-VERS LE RENFORCEMENT DE LA GOUVERNANCE DES EAUX INTERNATIONALES

 
Dakar, 30 jan (APS) – Des discussions sont en cours à Rome, la capitale italienne, sur les possibilités d’élargir les activités d’un programme mondial de renforcement de la gouvernance dans les eaux internationales et de consolidation des mesures de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), a annoncé la FAO.

Ces discussion ont notamment lieu en marge d’une réunion du comité directeur mondial du programme dénommé ZHJN (Zone marine hors juridiction nationale). Une rencontre devant s’achever ce jeudi, a indiqué l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture sur son site.

Ces échanges portent également sur les moyens d’améliorer la coordination entre les acteurs s’intéressant à l’utilisation durable des eaux internationales.


ZHJN, programme quinquennal financé à hauteur de 50 millions de dollars par le Fonds mondial pour l’environnement (FEM) et mis en œuvre par la FAO, a permis de faire ‘’d’énormes progrès en matière de protection de différentes espèces marines, comme les tortues de mer et les thons, a relevé un rapport de la FAO rendu public mercredi.


Ainsi, huit des treize principaux stocks de thon destiné au commerce ne font plus l’objet d’une surpêche dans les eaux internationale, tandis que le nombre des plus gros stocks de thon faisant l’objet de surpêche est passé de treize à cinq entre 2014 et 2019, souligne le rapport.


Selon la FAO, au moins six millions d’espèces de thon sont pêchées dans le monde chaque année pour une valeur annuelle des échanges s’élevant à près de 12 milliards de dollars en raison d’une forte demande et d’un nombre important de navires de pêche. Cela a été à l’origine d’une pression énorme sur les stocks de thon, fait-on savoir.


Chaque année, quelque 6 millions d’espèces de thon sont pêchées dans le monde. La valeur annuelle de ces échanges s’élève à près de 12 milliards d’USD. À cause d’une forte demande et d’un nombre trop important de navires de pêche, les stocks de thon ont été soumis à une énorme pression, selon la FAO.


Des modifications dans le matériel de pêche ainsi que des formations sur les techniques pour protéger les espèces menacées ont contribué à sauver des mammifères marins, en particulier les dauphins et les tortures de mer, fait-on valoir de même source.

’’Entre 2013 et 2018, par exemple, la mortalité des mammifères marins qui sont restés emprisonnés dans les filets des bateaux de pêche pakistanais dans le nord de la mer d’Oman a baissé de 98 pour cent - passant de 12 000 en 2013 à moins de 200 en 2018, alors que la diminution de la capture accidentelle a également été possible grâce à des dispositifs de concentration de poissons utilisés pour attirer les poissons, qui sont plus respectueux’’, lit-on sur le document.

L’agence onusienne soutient qu’avant la création du Programme, il n’existait pas de lignes directrices pour les DCP (dispositifs de concentration de poissons) dans les océans Atlantique, Indien, Pacifique ou à l’ouest et au centre de l’océan Pacifique. En 2019, ils en ont tous été dotés.

Entre 2014 et 2019, le Programme a contribué à la création et à la protection d’écosystèmes marins vulnérables dans 18 nouvelles zones qui ont été fermées à la pêche, fait remarquer la FAO.

 

 

IMMENSE INFRASTRUCTURE

6-Le barrage du Nil Bleu, modèle des futures "guerres de l'eau" ?

L’Egypte, l’Ethiopie et le Soudan ont décidé de repousser à la fin du mois de février la conclusion d’un accord sur le barrage de la Renaissance sur le Nil Bleu, après quatre jours de négociations à Washington. Donald Trump a exprimé son "optimisme" après des avancées lors de ces négociations.

Le barrage du Nil Bleu, modèle des futures "guerres de l'eau" ?
Du 28 au 31 janvier, les ministres des Affaires étrangères de l’Ethiopie, du Soudan et de l’Egypte négociaient à Washington, sous la supervision du Secrétaire américain au Trésor et du président de la Banque mondiale, la finalisation d'un accord sur le remplissage et l’exploitation du Grand Barrage de la Renaissance Ethiopienne (GERD en anglais), le fameux barrage du Nil Bleu censé devenir le plus grand du continent africain. Avec ses 1,8 km de long et 145 m de haut, celui-ci apporterait de l'électricité à l'Ethiopie, mais aussi à toute la Corne de l'Afrique. Lire la suite

Du 28 au 31 janvier, les ministres des Affaires étrangères de l’Ethiopie, du Soudan et de l’Egypte négociaient à Washington, sous la supervision du Secrétaire américain au Trésor et du président de la Banque mondiale, la finalisation d'un accord sur le remplissage et l’exploitation du Grand Barrage de la Renaissance Ethiopienne (GERD en anglais), le fameux barrage du Nil Bleu censé devenir le plus grand du continent africain. Avec ses 1,8 km de long et 145 m de haut, celui-ci apporterait de l'électricité à l'Ethiopie, mais aussi à toute la Corne de l'Afrique. 

Après que les modalités de fonctionnement du futur barrage, qui devrait débuter son activité fin 2020, avaient été actées le 15 janvier à Khartoum, cette réunion devait s'atteler à la rédaction juridique d'un accord. 

Or, au matin du 31 janvier, les négociations se prolongeaient encore, faute de compromis entre l'Egypte et l'Ethiopie. Les détails techniques sur la durée des étapes de remplissage, la quantité d'eau qui sera rejetée en aval par l'Éthiopie et la quantité d'eau qui sera retenue dans le réservoir en construction sont quelques-uns des plus gros points de blocage entre l'Egypte et l'Ethiopie. L'Egypte demande que l'Ethiopie remplisse graduellement ses réservoirs, sur une période de 12 à 21 ans en prenant en compte les périodes de sécheresse, afin d'éviter le risque de dramatiques pénuries d'eau. Jusqu'à présent, l'Ethiopie a refusé d'accéder à cette demande et souhaite que son projet hydroélectrique soit totalement opérationnel d'ici 2022 ou 2023. Addis-Abeba rejette également la demande du Caire de compenser financièrement tout futur déficit hydraulique, le considérant comme inutile si le remplissage graduel des réservoirs est acté in fine.  

A l'issue de la journée du 31 janvier, les trois pays semblaient pourtant avoir réussi à trouver un compromis... mais ont convenu de signer leur accord à la fin du mois de février seulement. 

La difficulté de ces négociations ne surprend guère : la construction de ce barrage est une véritable pomme de discorde entre, essentiellement, l'Egypte et l'Ethiopie depuis 2011. L'Ethiopie, qui fait face à de pénuries d'électricité très pénalisantes au quotidien, voit dans ce projet un outil de développement à très court terme. Le projet, qui n'a pourtant reçu l'aval d'aucun bailleur de fonds international, est devenu un véritable défi national dans lequel tous les Ethiopiens se sont engagés – parfois volontairement en travaillant comme ouvrier sur le chantier, parfois contre leur gré en subissant une baisse des salaires pour financer ce chantier pharaonique de 4 milliards de dollars. 

Mais pour l'Egypte voisine, ce projet n'est pas seulement un risque pour sa sécurité nationale, mais surtout une menace existentielle. L'Egypte, « don du Nil » selon le mot célèbre d'Hérodote, s'est construite depuis des millénaires autour du fleuve mythique. Aujourd'hui encore, il fournit au pays 97% de ses besoins en eau, et 95% de ses 100 millions d'habitants vivent sur ses rives. 

Le futur barrage construit sur un affluent du Nil Bleu, qui traverse l'Ethiopie mais nourrit 85% du Nil blanc, qu'il rejoint à Khartoum pour former le Nil, pourrait selon les économistes réduire drastiquement les réserves d'eau de l'Egypte. La perte s'élèverait à 10 milliards de mètres cubes d'eau par an, sur les 50 milliards en moyenne que l'Egypte tirait du fleuve jusqu'à 2018. Selon les estimations, une fois le barrage achevé, l'Egypte risque de perdre près de 1, 86 millions d'acres de surface cultivable, sur 8,5 millions dédiés à l'agriculture à l'heure actuelle. Si une telle situation se réalisait, ce sont plus d'un million d'emplois dans l'agriculture qui disparaîtraient, et un taux de chômage qui exploserait – alors que le gouvernement d'Al-Sissi a réussi à le diviser par deux en six ans. Au demeurant, même si l'exploitation du barrage constitue une menace réelle pour tout le peuple égyptien, elle n'ôte rien à la série d'erreurs et au manque d'anticipation des gouvernements égyptiens successifs, qui n'ont pas réfléchi à des alternatives pour améliorer la gestion de l'eau. 

Cette question géopolitique est devenue encore plus prégnante lorsque l'Egypte a menacé d'entrer en guerre contre l'Ethiopie, car le Caire estime avoir des droits historiques sur le Nil garantis par les traités de 1929 et de 1959. De son côté, l'Ethiopie avait assuré, par la voix de son Premier ministre Abiy Ahmed, « qu'aucune force » ne pourrait empêcher la construction du barrage et prévenu que « des millions de personnes » le défendraient si nécessaire. Depuis, les tentatives désespérées de parvenir à un accord se sont multipliées, sans succès jusqu'à aujourd'hui. L'Ethiopie a promis à l'Egypte qu'elle continuerait à recevoir la quantité d'eau nécessaire à son existence, mais sans accord formel, le Nil égyptien deviendrait de facto dépendant d'Addis-Abeba, une perte de souveraineté inacceptable aux yeux du Caire. 

En vérité, le conflit géopolitique qui se joue entre l'Egypte, l'Ethiopie et le Soudan est un modèle des futures « guerres de l'eau » qui risquent d'avoir lieu dans d'autres parties du monde dans les prochaines décennies – on songe notamment à la gestion des ressources de l'Indus entre l'Inde et le Pakistan. Face au dilemme de se développer a minima tout en devant faire face à la raréfaction de ressources naturelles auxquelles tout le monde affirmera pouvoir prétendre, les négociations entre pays voisins s'imposeront et seront de plus en plus ardues, voire pourront potentiellement dégénérer en conflits ouverts. Après tout, les Ethiopiens ne disent pas autre chose lorsqu'on leur réclame plus de considération pour leurs voisins. Ephrem Woldekidan, le directeur adjoint du projet justifie ainsi : « Quand on met en œuvre des projets ici, ce n’est pas pour nuire aux pays en aval. Il n’y a aucune raison que ces pays s’en plaignent, car c’est aussi notre ressource. » 

Ce n'est donc que fin février que l'on pourra juger de la victoire définitive de la diplomatie dans ce dossier aussi complexe, ou si les négociations n'auront obtenu qu'un accord sans véritables garanties  qui ne préservera pas les trois pays du bassin du Nil d'une guerre éventuelle. 

  7 -A Dakar, Kako Nubukpo appelle l’Afrique à rompre avec la “croissance sans développement”
A Dakar, face aux économistes, Kako Nubukpo a appelé l’Afrique à rompre avec la croissance sans développement au profit d’un nouveau modèle capable de créer de l’emploi. Le professeur s’exprimait, vendredi 31 janvier 2020, en marge de la cérémonie du lancement de son nouveau livre intitulé : « l’Urgence africaine, changeons le modèle de croissance ». Ainsi, chercheurs, universitaires, professeurs, étudiants, professionnels ont suivi avec intérêt une démonstration implacable des problématiques du développement en Afrique. Lire la suite

L'économiste Kako Nubukpo, ici entouré du professeur Salif Sy (à gauche) et Demba Moussa Dembelé (à droite) a présenté son livre "Urgence Panafricaine, Urgence Africaine, changeons de modèle de développement" dans une salle comble

A Dakar, face aux économistes, Kako Nubukpo a appelé l’Afrique à rompre avec la croissance sans développement au profit d’un nouveau  modèle capable de créer  de l’emploi. Le professeur s’exprimait, vendredi 31 janvier 2020, en marge de la cérémonie du lancement  de son nouveau livre intitulé : « l’Urgence africaine, changeons le modèle de croissance ».

Ainsi, chercheurs, universitaires,  professeurs, étudiants, professionnels ont suivi avec intérêt une démonstration implacable des problématiques du développement en Afrique. En écho au Brexit qui venait d’être acté en Europe, les panélistes africains ont également évoqué les limites de l’intégration économique régionale. Poursuivant son propos, l’auteur a expliqué que “le continent  a une croissance tout à fait acceptable  mais non créatrice d’emplois”.

Cette croissance  africaine n’est pas suffisamment inclusive, souligne M. Nubukpo, pour des “raisons bien connues  dans la littérature économique, notamment  l’insertion primaire au sein du commerce international”. Ce qui fait que  la croissance africaine  peut être forte en tendance et volatile au cours des rythmes des matières premières, a-t-il démontré. Selon l’ex-ministre togolais de la Prospective et de l’Evaluation des politiques publiques,  “cet accroissement ne  transforme pas suffisamment  la matière première”.

L’universitaire   a informé qu’il travaille avec ses étudiants sur la loi d’Arthur Okun rapportée à la situation de l’Afrique. Cette loi, explique-t-il, indique la proportion entre croissance du PIB et emplois générés dans l’économie. Le docteur en sciences économiques a exhorté ses pairs  à travailler encore plus sur le dégré d’employabilité lié à la croissance économique  dans nos pays.

Le cas de la Guinée Equatoriale

D’après  ses chiffres, l’expansion économique actuelle se fait  surtout dans les secteurs à forte intensité capitalistique  et pas suffisamment dans ceux à  forte intensité de main-d’œuvre. De ce fait, elle n’est pas suffisamment créatrice de revenus  parce qu’étant souvent dans  les secteurs à forte intensité capitalistiques  comme les secteurs miniers. Prenant le cas de la Guinée équatorial (GE), le togolais a montré que son revenu brut (une fois qu’on a payé la propriété du capital)  n’est que de 47%  de son PIB. C’est-à-dire que, chaque année,  plus de la moitié de la richesse créer  en Guinée Equatoriale ressort du pays  parce que le capital  est étranger.

Donc, argue M. Nubukpo, “vous allez avoir une activité intense dans le pays  qui va se traduire par une hausse  des loyers  de l’immobilier, poussant  les populations  vers les marges des grandes villes”. Au finish, ces populations ne vont pas s’enrichir  parce que le capital ne leur appartient pas. Pour sa part, le professeur Moustapha Kassé, très attentif,  a demandé aux  économistes africains de pousser davantage la réflexion afin de proposer des modèles alternatifs de développement.

L’Afrique  se cherche  depuis des décennies pour assoir un bon modèle de développement  et ainsi répondre aux urgences notamment à  l’accès à l’eau potable, à l’électricité et, entre autres, au  logement. Sur ce, les acteurs  du développement, les chercheurs  ainsi que les décideurs  publics  doivent travailler en étroite collaboration pour enfin  mettre  le continent  sur les rails de l’émergence.

 

 

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