Un outil pour prédire l'emplacement des futurs conflits liés à l'eau Les tensions dues à la pénurie d'eau se multiplient à travers le monde, notamment au Moyen-Orient et en Afrique.

C'est un outil unique au monde, qui pourrait bien aider à anticiper des désastres humains. Le système d'alerte Water, Peace and Security (WPS), développé par des scientifiques de six organisations en collaboration avec le gouvernement néerlandais, permettrait de prédire les éventuels conflits violents liés à l'eau jusqu'à un an à l'avance.

L'outil prend en compte les données environnementales d'une région (les précipitations, la sécheresse, les mauvaises récoltes...) et les associe aux facteurs démographiques, politiques, économiques et sociaux. Au total, le WPS intègre plus de quatre-vingts indicateurs sur les vingt dernières années.

Présenté au Conseil de sécurité des Nations unies avant son lancement officiel en décembre 2019, le système est principalement destiné aux responsables politiques et aux associations, bien que tout le monde puisse y avoir accès en ligne.

Selon le think tank Pacific Institut, les violences liées à l'eau ont doublé au cours de la dernière décennie. L'ONU estime que près de cinq milliards de personnes pourraient connaître des pénuries d'eau d'ici à 2050, exacerbant les tensions entre les populations rurales, urbaines et les gouvernements.

«Multiplicateurs de menaces»

Le WPS a déjà prédit plusieurs conflits susceptibles de se produire en 2020; l'Irak, le Mali, le Nigeria, l'Inde et le Pakistan sont particulièrement concernés. Les scientifiques estiment à 86% la probabilité qu'au moins dix décès liés au stress hydraulique surviennent dans ces zones identifiées.

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Sur place, les problématiques liées à l'eau sont multiples et complexes. Au Mali par exemple, les populations rurales sont dans une impasse face à la réduction des niveaux d'eau du fleuve Niger.

«La pénurie d'eau qui touche le Mali comme l'Irak est principalement due à des projets de développement économique (notamment des barrages) qui réduisent le niveau de l'eau et le débit des rivières, souligne Jessica Hartog d'International Alert, un partenaire de WPS. Cette situation est aggravée par le changement climatique et l'augmentation de la demande d'eau en raison de la croissance démographique.»

Les problèmes d'eau ne créent pas à eux seuls des guerres, précise Susanne Schmeier, maîtresse de conférences en droit et diplomatie de l'eau à l'IHE Delft«mais ils peuvent devenir des multiplicateurs de menaces lorsqu'ils sont combinés avec d'autres griefs, tels que la pauvreté et les inégalités».

La guerre civile en Syrie a ainsi été favorisée par un exode rural dû à une pénurie d'eau et des mauvaises récoltes. En Irak, l'incapacité des autorités à résoudre les enjeux liés à l'eau –près de 120.000 personnes ont été hospitalisées après avoir bu de l'eau polluée en 2019– «menace directement la paix fragile du pays», ajoute Jessica Hartog.

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