Davos. 1 500 jets privés, hélicoptères et limousines pour discuter du… réchauffement climatique.

Si le changement climatique figure en bonne place des préoccupations du Forum économique mondial, qui se tient du 22 au 25 janvier à Davos, en Suisse, c’est le plus souvent en jet privé que viennent en discuter les grands patrons et les responsables politiques. Ce qui fait grincer pas mal de dents.

Comme ici à l'aéroport de Nice, les jets privés se succèdent pour emmener grands patrons et responsables politiques à Davos. | THOMAS BREGARDIS / OUEST-FRANCEAfficher le diaporama

Au Forum économique mondial de Davos, en Suisse, tout se veut vert, tout le monde se veut écolo. Nature friendly. Eco-responsable. Irréprochable. À preuve, les ustensiles à usage unique ont été bannis ; les blocs de quatre poubelles à recyclage sont omniprésents ; les buffets proposent des protéines alternatives (traduisez : sans viande) ; les moquettes sont fabriquées à partir de filets de pêche usagés ; les peintures du décor sont à base d’algues ; et tout le monde parle de planter des arbres, beaucoup et partout. Bref, tout est parfait dans le meilleur des mondes.

Ou presque. Car le Forum de Davos est malgré tout, surtout, partout taxé d’hypocrisie climatique en raison du ballet de jets, d’hélicoptères et de limousines qu’il occasionne chaque année.

« Je trouve ça insensé »

Présente à Davos, Greta Thunberg, la jeune activiste suédoise de 16 ans, devenue figure de la lutte contre le réchauffement climatique, a évidemment taclé cette attitude : Je trouve ça insensé que des gens rassemblés ici à Davos pour parler du climat arrivent en jet privé.

Et Jennifer Morgan, directrice exécutive de Greenpeace International, n’hésite pas à mettre en avant les incohérences de ce sommet : C’est certainement contradictoire quand les gens s’y rendent en jet privé, c’est clairement un énorme problème.

Car un nouveau record de 1 500 vols en jets privés a été atteint cette semaine dans les aéroports avoisinant la station des Alpes suisses, d’ordinaire paisible, selon un communiqué de la société d’affrètement Air Charter Service (ACS). C’est 200 de plus que l’an dernier, un paradoxe alors que le changement climatique a été placé au premier rang des risques pour l’économie mondiale par les participants au Forum.

Hélicoptères et limousines pour terminer le voyage

Une fois arrivés dans des aéroports tels que Zürich, à deux heures de train de Davos, les passagers de ces vols privés poursuivent souvent leur voyage en hélicoptère, pour gagner du temps. Avant de terminer en limousine.

Au final, la demande pour les jets privés pendant la semaine de Davos dépasse de loin celle enregistrée lors d’autres événements, tels que le Super Bowl aux États-Unis ou la finale de la ligue des Champions de foot, relève Andy Christie, responsable d’ACS. Nous avons même reçu des réservations en provenance de Hong Kong, d’Inde ou des États-Unis. Aucun autre événement n’a une telle portée internationale, a-t-il ajouté, selon le communiqué.

Et la tendance est aux jets les plus gros et les plus coûteux possibles : C’est en partie dû aux longues distances parcourues mais aussi sans doute au fait que les rivaux en affaires ne veulent pas se voir surclassés, estime Andy Christie. Les organisateurs du Forum de Davos assurent compenser ces émissions par des initiatives en faveur de l’environnement et ont partiellement remboursé cette année les trajets en train.

Nous encourageons les participants à prendre aussi des mesures de compensation, a déclaré Dominique Waughray, responsable biens publics mondiaux du Forum. La plupart des avions privés sont en fait affrétés par des dirigeants politiques, parce que c’est plus efficace et plus sûr, a-t-il par ailleurs souligné. Donc c’est davantage une mesure de sécurité, mais nous les compensons quand même.